Ordre des parchemins selon les Richonim
Dans la tradition juive, une divergence d’opinions s’est installée parmi les décisionnaires médiévaux, connus sous le nom de Richonim, concernant l’ordre des parchemins à insérer dans les boîtiers des tefilines. Deux avis majeurs se distinguent : celui de Rachi et celui de Rabénou Tam.
Selon Rachi (et également le Rambam), l’ordre des parchemins est le suivant :
- Kadesh Li,
- Vehaya Ki Yeviacha,
- Shema Israël,
- Vehaya Im Shamoa.
En revanche, Rabénou Tam (et d’autres Richonim ainsi que le Talmud de Jérusalem) préconise un ordre différent :
- Kadesh Li,
- Vehaya Ki Yeviacha,
- Vehaya Im Shamoa,
- Shema Israël.
Malgré cette divergence, le Choul’han Aroukh (chapitre 34, alinéa 1) note que la coutume répandue dans le monde est de suivre l’avis de Rachi et du Rambam. Cependant, le Choul’han Aroukh ajoute (alinéa 2) qu’une personne craignant D.ieu accomplira les deux avis en portant les deux sortes de tefilines. Toutefois, l’alinéa 3 stipule que seul un homme reconnu pour sa piété portera également les tefilines de Rabénou Tam.
Avis des décisionnaires contemporains sur les tefilines de Rabénou Tam
De nos jours, le Rav Ovadia Yossef Zatsal (dans Halikhot Olam, page 23) souligne qu’étant donné que de nombreuses personnes, même simples, portent les tefilines de Rabénou Tam, chacun se doit de prendre en compte cet avis, surtout que selon Rabénou Tam et d’autres sages d’Israël, celui qui ne porte que les tefilines de Rachi ne s’acquitte pas complètement de la mitsva.
Étant donné l’importance capitale de cette mitsva, le Rav Ovadia Yossef Zatsal recommande vivement que chacun porte les deux types de tefilines. Néanmoins, il est de coutume chez les Séfaradim qu’un homme célibataire ne porte pas les tefilines de Rabénou Tam, sauf s’il est certain de ne pas avoir de pensées distrayantes pendant qu’il les porte.
Le Rabénou Ha-Ari, cité par le Ben Ich ‘Haï (Parachat Vayéra, alinéa 21), révèle au nom d’Eliahou Hanavi que les deux types de tefilines sont valides et nécessaires, car ils correspondent à différentes réalités mystiques. Pour bien accomplir le tikoun (réparation) de notre âme chaque matin, il est recommandé de réciter le Shema Israël avec les deux paires de tefilines, si possible en les portant simultanément (ce qui nécessite des tefilines de petite taille).
Si l’on décide de ne pas les porter simultanément, c’est-à-dire en mettant d’abord les tefilines de Rachi pour la prière puis ceux de Rabénou Tam après, on récitera la bénédiction uniquement sur les tefilines de Rachi. Le Rabénou Ha-Ari explique que les tefilines de Rabénou Tam possèdent un niveau de sainteté si élevé que la bénédiction ne s’applique plus à leur port.
Le Rav Ovadia Yossef Zatsal précise qu’il serait idéal de porter les deux types de tefilines simultanément. Toutefois, en raison des contraintes pratiques – telles que la nécessité de posséder des tefilines miniatures casher, la taille des parties du corps où les tefilines sont placées, et la difficulté de trouver des tefilines miniatures adéquates – il recommande de porter d’abord les tefilines de Rachi pour la prière, puis ceux de Rabénou Tam après la prière, en répétant les passages de Shema Israël et Vehaya Im Shamoa.
En revanche, le Rav Ben Tsion Aba Chaoul Zatsal conseille de porter les deux paires de tefilines simultanément, conformément aux recommandations de Rabénou Ha-Ari.
Le Choul’han Aroukh (chapitre 34, alinéa 2) enseigne que lorsqu’on porte les deux paires de tefilines (simultanément ou séparément), on doit avoir l’intention de s’acquitter de l’obligation selon toutes les opinions possibles en déclarant :
« Je pense être acquitté par les tefilines de Rachi si ce sont les vrais tefilines d’après la vérité, et dans ce cas, ceux de Rabénou Tam seront considérés comme des lanières de cuir. Ou bien je pense être acquitté par les tefilines de Rabénou Tam si ce sont les vrais tefilines d’après la Halakha, et dans ce cas, ceux de Rachi seront considérés comme des lanières de cuir. Ou bien si les deux sont vrais et qu’il faut les mettre en même temps, je pense m’acquitter des deux en même temps. »